Rien de mieux qu’un petit combo DVD + CD en amuse-gueule. Le retour du roi du calambour a été sans conteste l’un des évènements les plus revigorants de l’année musicale franchouillarde. Comme son collègue Polnareff en 2007, le vieux grigou s’est décidé de sortir de sa retraite volontaire pour un nouveau tour de chant, probablement le dernier, si l’on en juge le poil dans la main qui caractérise notre éleveur de chats préféré. Voir Dutronc en 2010, c’était donc Ze place tou bi, et logiquement, sa captation, Ze dévédé à avoir au pied du sapin. À l’annonce de ces concerts, beaucoup se sont excités, ont sauté au plafond, se rappelant à quel point Dutronc fut un artisan incontournable du rock français. L’espace d’une volée de 45 tours plus virulente que du bois vert, d’« Et Moi, et moi, et moi » (juin 1966) à « Fais pas ci, fais pas ça » (juin 1968), le dandy a tenu la dragée haute aux Kinks, Pretty Things et autres Troggs de l’autre côté de la Manche, et trancha considérablement dans le paysage musical français, annonçant l’avènement des Polnareff, Antoine et autres beatniks compositeurs et arrangeurs de leurs propres chansons. Tranquillement, il se mua en chanteur pour mémère, enfilant les 45 tours comme des blagues, capable de quelques saillies vertigineuses (« Le Responsable », « Restons Français, soyons gaulois »), avant de se tourner vers le cinéma. C’est qu’on aurait presque oublié que le Dutronc fut parfois le détenteur de la palme du mauvais goût, avec un sens de l’humour qui peut porter à débat, capable de jeux de mots scatologiques aussi discutable que ceux d’un Gainsbourg imbibé (l’album Guerre et Pets). Il n’y a qu’à jeter un œil sur son erratique discographie à partir des années 80, avant le réveil au début de la décennie suivante pour cette fameuse tournée immortalisée au Casino de Paris, malgré une relecture balourde de son répertoire, uniformisé FM des années 90 jusqu’au bout de l’appendice. Donc, vingt ans plus tard, que vaut Jacques Dutronc sur scène ? Même musiciens qu’en 1992 (Jannick Top, Erdal Kizilcay, Bernard Arcadio), même configuration scénique sobre (décor noir, costumes noirs), et, à peu de chose prêt, les mêmes arrangements pour la même setlist (à laquelle se sont greffés ses créations les plus tardives, pas les plus mémorables : « Tous les goûts sont dans ma nature », en duo avec Etienne Daho, et « Madame L’Existence »). D’un côté, on peut être ravi de retrouver Dutronc, se dandiner, le sourire narquois derrière ses lunettes, raides du bassin, le pantalon relevé aussi haut que le ferait Jacques Chirac, soufflé par la pureté de sa voix, sans perdre une seule miette de ces tubes que nous étions trop jeune pour découvrir sur scène. D’un autre, on a l’impression d’être à la foire de Moussy-le-Vieux, l’ensemble sonnant un brin lourdingue, dû en partie à un groupe de cogneurs, pourtant de fervents virtuoses mais qui ne s’emballent jamais. Le Dutronc oscille entre le sublime et le hasardeux, abrégeant parfois ses mélodies vocales, mi-chantées, mi-parlées. On se dit qu’il manque un truc, une folie. Puis le vieux ne peut s’empêcher d’exprimer son mauvais goût, dont l’humour semble bloqué à Paul Préboist, avec ce numéro de cirque de la pauvre naine vêtue de rouge, dont la prestation nous rend un brin mal à l’aise… Mais ce ne sont que des remarques de puristes et, c’est bien connu, un puriste encule des mouches. Ne boudons pas notre plaisir, car ce dévédé (et cédé) fourni quelques ravissants bonux, dont un duo avec Vanessa Paradis sur « Le Petit Jardin », joyau inébranlable de l’œuvre de Jacques Dutronc, sans oublier un roboratif documentaire sur cet improbable mais réjouissant retour.
Acteurs | |
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Réalisateurs | |
Durée | 00h00 |
Pays | |
Année de parution | |
Au CE depuis le | 26-01-2011 |
Identifiant CE | 302979 |
Rayonnage | MUSIC |